Lorsqu’on va parler de bilinguisme ou de multilinguisme (le fait de parler plusieurs langues), on va utiliser régulièrement les termes de langue majoritaire ou dominante, tout comme les termes de langue non dominante ou minoritaire.
Avant de rentrer dans le vif du détail, on peut s’interroger sur le terme « langue maternelle ». Ça paraît bête comme ça, mais finalement, est-ce que c’est plutôt la langue de la mère, de la famille, la langue dans laquelle on a été élevé, ou bien la langue de la mère-patrie, la langue du pays dans lequel on est né ? Le terme prête à confusion, et la question est longuement exposée dans un article de Pierre Boutan*. Cette expression de « langue maternelle » est encore plus glissante quand on parle de famille bilingue, ou de famille porteuse d’une langue qui n’est pas celle du pays où on vit…
Bref, on parlera donc plutôt de langue majoritaire, langue dominante et au contraire de langue minoritaire et langue non dominante
Le langage majoritaire, la langue la plus utilisée
Le langage majoritaire est la langue utilisée par la plus importante part de population sur un territoire. En France, c’est donc le français qui est la langue majoritaire. C’est souvent (je dis bien souvent) également la langue officielle du pays. Le Français n’est toutefois pas la seule langue pratiquée sur notre territoire, elle cohabite avec une multitude de langues minoritaires, telles que l’anglais, l’italien, l’espagnol, le grec, l’arabe… (il semblerait qu’il y ait 75 langues pratiquées en France !**)
Certains diront que dans quelques quartiers français, la langue majoritaire n’est pas le français, ce qui n’est pas faux strictement vu au niveau du quartier. Mais dès que nous dézoomons un peu, le français reprend le dessus et redevient la langue majoritaire. C’est la langue avec le plus haut statut.
Au cours de notre vie, nous serons toujours confrontés à la même langue majoritaire, sauf si nous déménageons ou voyageons dans une contrée avec une langue majoritaire différente.
La langue dominante, langue forte d’une personne bilingue
La langue dominante d’une personne bilingue correspond à sa langue forte, celle où il est le plus à l’aise pour s’exprimer, où il détient le plus de vocabulaire. À l’inverse, la langue non-dominante est celle qui présente plus de difficultés pour la personne bilingue, celle dans laquelle il est moins naturel de penser et s’exprimer.
La langue dominante peut varier en fonction des circonstances. Par exemple, j’ai appris à méditer en anglais, et depuis, c’est l’anglais qui est ma langue de référence lorsque je souhaite méditer (écouter une vidéo / un podcast / m’exprimer). Pour d’autres personnes, la langue dominante dans le cadre professionnel pourrait être l’anglais, même si ce n’est ni la langue majoritaire (du pays dans lequel on se trouve), ni la langue maternelle du locuteur.
Ce qu’on peut retenir de cela, en ce qui concerne notre sujet de l’éducation bilingue (attention enfonçage de portes ouvertes), c’est que dans la plupart des cas, la langue majoritaire va également devenir la langue dominante. Et par conséquent, la langue minoritaire va sûrement devenir la langue faible, non dominante.
Et c’est là, où nous intervenons, nous parents. Si nous souhaitons faire en sorte que cette langue minoritaire reste aussi forte que possible, alors à nous de mettre en place les stratégies les plus adaptées. Il va falloir souvent batailler pour que la langue minoritaire surnage et reste à flot, au milieu d’un océan de langue majoritaire !
* l’article « Langue(s) maternelle(s) : de la mère ou de la patrie » de Pierre Boutan : https://www.cairn.info/revue-ela-2003-2-page-137.htm?contenu=article
** d’après un rapport de B.Cerquiglini, cité dans le même article.
Papa Chouette et Maman Chouette, août 2022